Tagué: heures oisives
Deuxième talk show aujourd‘hui …
Aujourd‘hui, cet après-midi, nous faisons notre deuxième talk show avec monsieur Iwata Kenzaburo, sur le thème des Heures Oisives de Yoshida Kenko (ou Urabe Kenko).
Nous allons couvrir au max quatre textes,
- 82 laisser une place d’inachevé、
- 68 les gros radis、
- 55 comment bien construire sa maison、
- 74 les fourmis
en fonction du temps que nous passerons sur chacun.
Cela demande beaucoup de préparation, d‘abord pour la sélection des passages, leur compréhension, l‘idée pour un dessin les accompagnant et puis les questions, les thèmes que l‘on veut développer dessus au moment du talk show.
Bien évidement chaque étape me permet d‘apprendre énormément de choses, dans tous ces domaines différents, la compréhension de la langue et de la culture japonaises, la connaissance de l‘histoire, comment «décortiquer» un texte, et en extraire ce qui est aujourd‘hui des pépites et en faire des dessins …
En background les soirs de semaine je me prépare pour les talk shows futurs en lisant d‘autres ouvrages que je voudrais pouvoir aborder même superficiellement, comme le dit des heiké (12è siècle, gros pavé difficile d‘accès), l‘essai d‘esthétique de Tanizaki sur l‘éloge de l‘ombre (cependant ça n‘est pas vraiment de la litérature classique, ça date de l‘avant guerre) par exemple …
Les quatre passages sélectionnés aujourd‘hui: tous ouvrent la porte sur des concepts fascinants
- 82 laisser une place d’inachevé、–> éviter la perfection
- 68 les gros radis、–> ne pas sous-estimer l‘importance, la puissance de la foi
- 55 comment bien construire sa maison、–> garder une pièce vide sans usage prédéterminé
- 74 les fourmis –> on s‘active tel les fourmis, courant d‘un point A à un point B, mais à la fin c‘est la mort qui nous attend au bout de la route
Mmmm peut-être que, si je continue à travailler pour ces talk shows j‘arriverai à être un peu moins con … ce serait cool !
Ici, la page préparée pour l‘histoire des gros radis … J‘aime beaucoup ce dessin, j‘en suis très content …
L‘histoire raconte comment deux radis viennent défendre un préfet attaqué par des brigands … ce préfet qui depuis des années a religieusement mangé des radis pour son petit déjeuner … ici j‘ai dessiné donc un radis japonais (daikon) vétu d‘une armure, mais une armure européenne, car, pourquoi pas !!!
Eté formidable, projet formidable
Cet été a été formidable. Il a fait chaud mais c’était beaucoup plus supportable que l’année dernière. peut-être grâce aux doubles fenêtres désormais installées dans ma maison-bureau ? C’est vrai que maintenant la petite clim a un effet …
J’ai repris ma vieille habitude chaque après midi d’aller marcher deux heures sous le soleil; j’emporte des boissons et s’il ne fait pas trop chaud j’ajoute des poids dans mon sac à dos. Souvent j’écoute un podcast en alternant sur les sujets ou alors les œuvres d’orgue complètes de Bach par Marie Claire Alain. Je crois que l’homme aime suivre des habitudes tout devient un rituel …
Des ours ont été repérés pas loin et lorsque j’emprunte une petite route dans la montagne je switch le son sur un petit haut parleur. Je me demande d’ailleurs si la musique d’orgue de Bach qui est si belle n’aurait pas un effet contraire, si au lieu d’éloigner les ours et ne les ferait pas venir ? ? Comment vérifier ….
Au bureau j’ai été assez absent … , physiquement j’ai travaillé comme d’hab mais j’avais la tête ailleurs !
J’ai du mal à imaginer comment c’est en Europe où les gens prennent de vraies vacances d’été. Deux semaines, trois semaines … ca fait très longtemps que je n’ai pas fait ça. Déjà ici prendre une semaine entière c’est une marque d’audace par rapport à mes collègues US qui semblent ne prendre que deux semaines dans l’année… Les pauvres …
J’ai un nouveau projet qui m’occupe beaucoup. C’est tout à fait merveilleux: plus tôt au moins de juin; monsieur Iwata Kenzaburo m’a proposé de faire ensemble un talk show mensuel, dans un café situé à côté du château de Himeji.
Le sujet du talk show: la littérature classique japonaise.
On choisit un livre, pour le premier talk show ce sera les Heures Oisives de Urabé Kenko écrit au 14è siècle. Du book; je choisis deux ou trois passages, sur lesquels nous discuterons.
Ce livre est un de mes livres préférés, c’est un peu un manuel de la vie …. C’est plein de bon sens. C’est parfois drôle … rarement hermétique…
C’est un honneur incroyable de pouvoir ainsi faire un projet et collaborer avec monsieur Iwata. Je dois me pincer les fesses pour me dire que je ne suis pas en train de rêver !
Le premier talk show, c’est bientôt; le 6 septembre à 14 heures, dans le café Kokuraya à Himeji https://www.instagram.com/kokuraya.himeji/
Cela requiert de la préparation:
D’abord il faut tout relire, choisir les passages et ceux-là je les lis et relis en japonais; pour bien comprendre. En Japonais moderne et classique … que j’ai jamais appris bien sûr.
Et puis ensuite nous nous retrouvons avec monsieur Iwata pour en discuter et faire un point.
Cerise sur le gâteau je prépare un petit livret, avec le texte en japonais ancien et j’ajoute une petite illustration; afin d’amuser étonner éclairer les spectateurs !!
Donc c’est sûr rien qu’avec ça je n’ai plus le temps de penser au travail, et c’est très bien ainsi !
Déblocages: La lecture en Japonais
J’ai pu réaliser récemment plusieurs déblocages. En voici un, d’abord, sur le sujet de la lecture en Japonais.
Je vis au Japon depuis plus de vingt ans et pourtant je lis très, très peu en Japonais. En tout cas, je ne lis pas en Japonais pour le plaisir, mais plutôt par nécessité. Ce qui est vraiment dommage et un finit par constituer un handicap.
Le fait que mon travail se fait tout en Anglais n’aide pas du tout. Et en plus beaucoup des infos que je consulte ou consomme sont elles aussi en Anglais, que ce soient des podcasts ou des vidéos sur youtube.
La découverte plus tôt cette année du fanzine de monsieur Iwata a aidé mon cerveau à former de nouvelles connexions. Cet été j’ai lu des recueils de chroniques qu’il avait écrites pour le Kobe Shinbun.
Donc j’avais une pile de héra hera tsushin (le fanzine en question) à côté de mon futon. Un soir que je bouquine avant de me coucher, je comprends tout d’un coup que ce héra héra tsushin que j’aime tant est un peu l’équivalent contemporain des Heures Oisives de Urabé Kenko (14è siècle). Je me suis mis alors à relire les Heures Oisives, en Français. C’est l’un de mes livres préférés et il m’a suivi partout. En le relisant avec énormément de plaisir je découvre qu’il évoque le temple de Engyo ji de Himeji (à 10 km de la maison). J’y prends tellement de plaisir que j’achète une édition de l’époque de Meiji afin d’essayer de me rapprocher un tout petit peu du sujet et de l’esprit …

Cet ancien livre décrit un ancien monde révolu. Et ces belles illustrations. La calligraphie, qui imite une écriture au pinceau et se nomme kusushimoji rend le book tout à fait inbitable au novice que je suis et resterai.
J’ai parlé des heures oisives et des points communs avec héra héra tsushin à Monsieur Iwata et ça lui a fait très plaisir …. il a même mis dans son fanzine une photocopie de mon exemplaire des heures oisives !
(magazine du 27 mai 2024) https://www.hera-hera.net/nikki202405.html#top

Plus tard je lui ai aussi donné un dessin de lui et de urabe kenko dans la même maison, à des époques différentes. Il l’a mis aussi dans son fanzine.
(magazine du 2 août 2024) https://www.hera-hera.net/nikki202408.html

Un autre événement c’est un workshop sur le théatre noh, dans un restaurant pas loin d’ici. Des acteurs de noh viennent nous présenter leur art, en particulier leurs instruments de musique. Au préalable nous devions, les participants, préparer un petit texte sur le noh, ce que j’avais fait avec plaisir …
Le workshop se passe très bien et à la fin nous emportons avec nous les copies des textes écrits par les autres participants. Ma première réaction -typique- était ah non je ne vais pas lire ça (trop difficile). Mais finalement une fois de retour à la maison je me mets à lire les textes écrits pas les autres participants.
En particulier le texte écrit par un participant qui compare l’histoire de la pièce de noh « hachi ki » à certains passages de la bible. Ce texte est magistral et sa lecture me donne beaucoup de plaisir.
Finalement: je me dis: hey, je peux lire des choses « compliquées » comme ça, sans avoir recours au dictionnaire… C’est comme une révélation..!
Pour tester cette « théorie » je vais chercher un roman contemporain; La Fille de la supérette (コンビニ人間, Konbini Ningen). Le texte est simple dans un contexte que je connais et ce livre finalement se laisse lire. Sur les pages je copie les mots et les idéogrammes que j’ignore.

Je lis ce livre avec plaisir. Constater que je peux lire avec un effort raisonnable un roman en Japonais me donne confiance et dissout mes réticences.
Ainsi je peux découvrir de nouveau le Japonais écrit. Et il y a vraiment des pépites à découvrir, dans les expressions et les tournures de phrases. OMG !!
Quel idiot que je suis mais mieux vaut tard que jamais; sans doute absorbé dans le travail et toutes les autres choses, ces 20 dernières années, je n’avais pas essayé vraiment de lire en Japonais.
Or, il y a tant de choses à apprendre.
En même temps, en tant qu’auteur de BD, je me renseigne sur la nécessité de créer une maison d’édition.
Je m’intéresse aussi aux librairies, au Japon. Avec la digitalisation, le vieillissement de la population, et l’accaparement des cerveaux par les smart phones, beaucoup de librairies au Japon ont fermé. En 20 ans, un tiers des librairies au Japon a fermé.
La magie encore de youtube, (cette même magie qui contribue aux faillites de librairies) m’informe que, au milieu de ce marasme, il y a des cas exceptionnels, comme par exemple une librairie ouverte 24 heures sur 24, car elle est jointe à un convenience store (konbini) Family Mart. Ce qui est fou, c’est que cette librairie n’est qu’à 40 km d’ici. Trop curieux j’attends la nuit et je vais voir….

Pour y trouver quelques romans contemporains auxquels je vais m’essayer. Il faut, en effet, continuer à apprendre…

Déjà Juin.
Juin. C’est l’été. La deuxième des cinq saisons du Japon. (Printemps Eté Enfer Automne Hiver)
Ce mercredi 5 juin c’est du big car l’après midi monsieur Iwata Kenzaburo dont le fanzine hérahéra m’a donné une énorme claque va faire mon ‘interview’ dans un restaurant galerie à 10 km d’ici.
Il publie ensuite les interviews dans son fanzine …
Pour préparer l’interview il est venu nous rendre visite lundi dernier, avec son assistant. On a donc passé une heure et demie dans le jardin avec thé et café. C’était un moment assez incroyable. Mais nous étions tellement dans le moment que nous n’avons pas pris de photo !
Côté jardin la récolte des oignons est très décevante. Décidément je n’ai toujours pas la méthode. Les oignons sont rikiki.
Les carottes et les laitues marchent bien. Mais ici aussi la récolte sera-t-elle à la hauteur des espérances ? Pas certain.
Jeudi un villageois a aperçu un ours au sud de notre vallée.
Apparemment beaucoup de châtaigniers n’ont pas survécu à l’été dernier, à cause d’un insecte. Il faut que je demande à Sakichan de quel insecte exactement. Voila, avec cette cata pour les châtaigniers, les ours ont beaucoup moins pour se nourrir avant l’hiver … Ces changements dans les forêts touchent les ours directement qui, affamés; n’ont alors plus qu’à se rapprocher des villages … Déjà que les forêts constituées ici à 80 pour cents de cryptomères forment un écosystème pauvre avec peu de nourriture pour les animaux….
Regarder les niouzes à ce sujet est également pathétique. Les niouzes vont décrire les ours comme un animal dangereux etc mais sans remarquer du tout que si leur habitat leur permettait de s’y nourrir eh bien il n’y aurait pas de problème. Décidément l’homme moderne a été perdu sa connexion avec la nature.
Je m’étais fait cette remarque il y a 2 ans déjà; lorsque les feux de forêt faisaient rage en Australie, j’avais alors évoqué ces incendies avec une collègue de Sidney, et la seule chose qu’elle évoquait, c’était … les fumées … aucune pensée pour les millions d’êtres vivants; végétaux, animaux qui disparaissaient dans la fournaise ?? Cela m’avait vraiment attristé. Exactement pareil lors des feux de forêt en Californie et j’avais alors eu exactement le même genre de réflexion de la part des collègues américains.
L’homme est foutu !
Mardi il y a eu des pluies très violentes qui en une nuit ont presque rempli la rivière qui coule juste à côté de chez nous …
Très impressionnant

Un petit canal d’irrigation autrefois installé pour alimenter les rizières en eau qui s’étend sur l’autre côté de la maison était lui aussi plein à rabord, menaçant d’inonder notre maison…
A cinq heures du matin deux voisins s’y affairaient à retirer des pierres et des branches dans le canal d’irrigation pour éviter les débordements. Ce matin j’ai alors annulé mes meetings du boulot pour pouvoir me joindre à eux.
Pour éviter que ce canal ne déborde on est allés le bloquer plus en amont avec une planche coupée illico presto ….

Les choses sont retournées à la normale; la pluie a cessé vers 15 heures et les niveaux ont commencé à baisser peu après.
Au sujet de mes dessins inspirés du style ukiyoé j’ai fini le 47è cette semaine. Je vais essayer d’en faire un livre où il y aura une sélection des dessins et, à côté, des dessins plutôt style BD … Il y a encore beaucoup de travail à faire ! Mais je pense que cela pourra aboutir à quelque chose de très original.
Revenons aux moutons de monsieur Kenzaburo Iwata …. Son fanzine hérahéra tsushin dont j’ai dévoré quelques numéros m’a soudainement fait penser au classique japonais: les heures oisives, écrit au 14è siècle par Urabe Kenko. Le titre japonais de ce chef d’oeuvre c’est tsurezure gusa ….
Je l’ai donc relu; en avril. pour la 4è fois. Et c’était vraiment passionnant. Je devrais faire un article avec des extraits. ISBN– 2070709256 Qu’il est bon de lire de telles merveilles!!!
Lorsque monsieur Iwata est venu nous voir lundi; je lui ai parlé de cette analogie que je m’étais faite; entre son travail et le tsurezure gusa … Voila qui l’a bien intéressé … Je vais chercher le livre, que j’avais acheté à la fnac à Paris en 1992 ou 1993 … et je lui montre alors le passage où Urabe Kenko parle du temple de Shosha qui est à Himeji à juste 25 kms de notre village: Voila qui l’époustoufle !!
Il demande une photocopie du passage avant de partir …
Et voila que le lendemain; sur son blog où il poste les pages de son fanzine avant impression …. Il parle de notre rencontre et de tsurezuregusa !!! https://www.hera-hera.net/nikki202405.html#top …. sur le menu à gauche sélectionner la date du 28 MAI


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