Tagué: sashimi de poulpe
Le dialogue de vendredi
Côté travail, cette semaine a été un peu lourde avec pas mal de déconvenues et peu de sommeil. Pas vraiment productif. C’est vendredi en fin d’après midi et je vais voir S., de l’autre côté du hameau. (de l’autre côté de la montagne). S. est charpentier, a commencé à travailler à l’âge de 14 ans et a construit 100 maisons. Je dois lui payer une facture pour la fenêtre et le bois de la cabane dans l’atelier. J’ai avec moi aussi un maxi pack de 24 canettes de bière.
Je le trouve avec ses chats et ses chèvres devant la terrasse de sa si belle maison.
S’engage alors un beau dialogue qui me réjouit et pulvérise toute la fatigue de la semaine. Malheureusement ma traduction perd la truculence savoureuse du dialecte local. (le dialecte du banshu).
S -> notre ami
H -> épouse de S
WT -> Wakame Tamago
Ca commence bien:
S: Dis, tu tombes bien: on a besoin de ton aide; il y a O., qui habite au fond de la vallée, celui qui fait des épouvantails, hé bien il y a un Argentin qui va venir lui rendre visite et le prendre en photo ..; comme il n’a jamais vu d’étranger il voudrait te voir pour te poser des questions… C’est où ce l’Argentine d’ailleurs ?
La femme de S s’appelle H.
H: Buenos Aires !!!
WT: Euh, c’est en dessous du Brésil. Ah dis donc une grosse question c’est où l’Argentin va pouvoir dormir et si il y a quelqu’un du village qui pourrait le loger chez lui.
H amène des bières et des cacahouètes.
S: C’est très difficile ça. Tu vois, tu dois construire une tree house dans ta montagne !!! Je la construirai. Il faut le faire tant que j’ai la pèche.
WT: Ah dis donc ce serait fantastique ça. Mais n’y a t il pas trop de sangsues dans la montagne pendant l’été ? Les gens auraient peur. Moi aussi d’ailleurs.
S: Mais non, c’est rien ça. Tu vois des gens viendraient du monde entier visiter le village !
WT: C’est sûr que cela devrait intéresser un certain public, en plus, un tree house. Ca pourrait même devenir un business.
S: Ah non …. Un projet comme ça, ça doit pas être pour gagner des sous mais pour s’amuser… Tu te ferais plein d’amis.
WT: Good point.
S: Pour gagner de l’argent il faut compter sur son travail principal, rien d’autre. Entre nous ..; nous les hommes … on n’a pas besoin de beaucoup pour vivre. Il nous faut juste assez d’argent pour payer l’alcool et le tabac.
H amène un sashimi de tête de poulpe. C’est délicieux ! Et une deuxième bière. H voyant ma réluctance devant la deuxième canette de bière devient taquine.
H: Comme tu rentres à la maison en camion, tu veux que j’appelle le policier qui habite dans la vallée et que je lui demande de t’accompagner ?
WT: Question logement pour les voyageurs et visiteurs, le mieux quand même ce serait une maison japonaise, ancienne, dans le village … une maison authentique, comme la maison de 1000 ans … Je suis sûr qu’on y dormirait très bien !
S: Ah oui ça alors !! Nous les Japonais nous nous sommes trompés. Les maisons anciennes étaient fraiches l’été, chaudes l’hiver… Aujourd’hui dans les nouvelles maisons le gens sont obligés de mettre la clim’ ou le chauffage en permanence.
WT: Ah oui. Nous on n’a pas installé la clim’…
S: Exact ! Tu peux te le permettre dans une maison ancienne. Et puis les nouvelles maisons sont entièrement hermétiques. Si bien qu’on est obligé de mettre des ventilateurs partout pour aérer ! Ca n’a aucun sens !
Maintenant on parle un peu poulpe. Tête de poulpe.
WT: Dis, c’est délicieux la tête de poulpe ! J’avais envie de poulpe depuis pas mal de temps.
S: J’adore ! On les achète chez un poissonnier de la ville voisine.
WT: En général on n’y trouve que les tentacules dans les supérettes …
S: Peu de gens aiment la tête … Moi j’aime la tête de poulpe .. la chair est tendre … et ce poissonnier vend une tête 50 Yens. (40 centimes d’euro).
H: Tiens tu vas emporter une tête avec toi, pour le diner. Avec du gingembre et de la sauce de soja.
(….)
S travaille en ce moment à démolir une maison dans une ville voisine.
WT: Comment avance le chantier de démolition ?
S: Ca peut aller
H: Par contre j’ai failli marcher sur un clou l’autre jour sur le chantier
WT: C’est dangereux ça !
S: Ah oui ! Quand j’étais apprenti, je me suis frappé les plantes de pied avec un marteau, on y a ajouté de l’huile et mis le feu. Pour éviter les futures blessures.
Ces propos me surprennent tant que je décroche un peu je l’avoue.
Pause cigarette.
WT: A propos de voyageur. Un lecteur français de ce blog est en train de voyager au Japon. Il m’a contacté sur Facebook. Il apprécie les outils japonais et m’a demandé le nom en Japonais du cordeau à tracer. Tu te souviens, j’avais photographié le tien.
S: Ah oui. Celui qu’il a acheté, il y a une grue et une tortue dessus ?
WT: Non mais il est en forme de baleine.
S: Le mien est en plastique tu sais. C’est que je ne prends pas soin de mes outils.
(….)
WT: Les scolopendres sont tardifs cette année, je n’en ai pas encore vu
H: Il y en avait un ici hier soir je l’ai écrasé avec ma pantoufle.
WT: Leurs morsures sont très douloureuses. Il parait qu’il faut verser de l’eau chaude sur les morsures, cela arrête la douleur.
S: Le thé tue les scolopendres. Si tu en verses dessus il va crever. Les tanins dans le thé vert tuent les scolopendres.
WT: N’empêche que les scolopendres ne sont pas si méchants que ça.
S: C’est sûr. Celui qui vit ici on est obligé de devenir l’ami des insectes.
(pause cigarette)
S: D’ailleurs il n’y a aucun danger dans la nature ici. Personne dans le village n’est mort à cause d’une vipère. Le seul danger ce sont les frelons asiatiques mais c’est tout. Rien à voir avec l’homme en qui on ne saurait faire confiance.
D’ailleurs moi quand je travaille seul dans les bois ou les montagnes, à couper des arbres, la vue d’un animal sauvage ne me surprend jamais, que ce soit un serpent ou n’importe quoi d’autre … un peu comme si je les sentais venir … mais si je vois un homme; je suis tout de suite sur mes gardes.
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