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Un Beau village le long de la Route n29

Ici je veux vous présenter un petit village dont nous avons fait la découverte dimanche dernier.

Juste au bord de la route nationale 29 qui traverse du nord au sud le Japon; plus précisément en connectant la ville de Himeji à la préfecture de Tottori au nord.

Route pittoresque car une grande partie du pays traversé est montagneux. on passe au pied du mont hyono qui fait 1500 mètres c’est quand même pas ridicule.

On a trouvé ce village vraiment par hasard, en passant en camion. L’étroitesse de la vallée perpendiculaire où il se planque nous a tout de suite intrigués.

Vous pouvez trouver l’endroit sur google: Wakasa, Yazu District, Tottori 680-0735

C’est très mignon. Il y a quoi, trente maisons en tout ? Elles sont de chaque côté d’un chemin goudronné qui serpente et se hisse jusqu’au fond de la vallée.

Certaines maisons sont assez récentes mais le tout a beaucoup de caractère.

L’histoire de ce village est particulière: Ce sont des membres du clan Heiké qui chassés au 12è siècle sont venus se réfugier dans ce coin.

Leurs descendants vivent toujours dans ce village. Et il faut souligner que toutes les familles qui y habitent portent ce nom: heiké. J’ai vérifié en lisant les noms sur les maisons.

(dans notre village aussi il y a des descendants du clan des Heiké qui ont fuit à la même époque)

Si l’on va jusqu’au fond de la vallée on peut admirer un énorme rocher, sous lequel les ancêtres du clan heiké se sont réfugiés … Ils y ont creusé une sorte de grotte dont je n’ai pas pu trouver l’entrée et s’y sont cachés pendant vingt ans, dit on sur la pancarte.

Il faut imaginer tout celà: il n’y avait pas internet ni de playstation même pas amazon à l’époque; comment faisaient ils, au douzième siècle ?

… je plaisante … c’était certement très bien le 12è siècle, y a pas de raison.

Au fond de la vallée le chemin mène à l’ancienne caverne que les fugitifs de heiké ont creusée avec leurs dents.

L’endroit est absolument superbe et on croirait se diriger vers le gros arbre où Totoro aime faire la sieste l’après midi.

L’endroit est superbe et je me dis que ce serait féérique comme celà partout ailleurs si le Japon ne s’était pas lancé dans la plantation massive de cryptomères il y a cinquante ans! De la belle forêt comme celà on en mangerait.

Cette belle pancarte nous informe de la présence d’ours exhibitionnistes.

Ensuite on redescend et retourne sur le hameau.

Belle récolte d’ail.

J’adore ces villages tarabiscotés !

Et la présence de l’eau change tout.

Les fleurs blanches c’est du sarrasin (pour faire du soba). excellent engrais vert qui fixe l’azote.

Un escalier en pierre grimpe assez sec et mêne au sanctuaire shintô qui protège le hameau. A l’époque Heiké ce devait être un bon endroit pour s’y planquer et faire le guet.

Car la vue est bien dégagée.

Au dessus on distingue une bâtisse très modeste qui ressemble à un garage où l’on garde un motoculteur.

La région reçoit beaucoup de neige l’hiver. Enormément de neige.

Je tire la chevillette, et la bobinette choit.

En réalité cette bâtisse très modeste, c’est le sanctuaire. C’est la première fois que je vois un tel sanctuaire; aménagé ainsi tel une pièce d’habitation.

On redescend.

Mais je m’arrête pour admirer cette scène éternelle. Ce petit potager. Installé au pied d’un jizo. Et la vieille paysanne qui sous le regard protecteur de celui ci œuvre en silence.

Quelle belle promenade. La beauté de ce village; la patience et la tenacité de ses habitants me touchent.

Tout celà inspire le respect.

Mais c’est le moment de reprendre la route. mais d’abord; admirons ce beau camion tout neuf. Quelle belle couleur. Quelle classe.

Le sanctuaire de l’arbre sacré

Ce matin il neige encore et toujours. Vais voir l’arbre sacré, sa branche arrachée et tombée dans la rivière. Repérage pour quand je pourrai revenir avec ma tronçonneuse pour dépecer le bois en des morceaux transportables.

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Au pied de l’arbre sacré donc il y a un sanctuaire. C’est une petite construction. Qui a été entièrement refaite il y a deux ans je crois.

A l’intérieur il y a des jizos de pierre. Je fais coulisser la porte et jette un coup d’oeil.

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Un banc de chaque côté et un petit autel; avec cinq jizos, tous de taille différente. Deux bouquets de fleurs. Des offrandes (des mandarines). Et tous les ustensiles utiles pour la prière.

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Au dessus des jizos, une planche de bois avec ces caractères えんめいじぞうそん 延命地蔵尊 Jizo de longévité.

La même ambience et tranquillité reposante que dans une chapelle à la campagne.

Dans cette petite pièce il y a persistante une odeur d’encens. Il y a donc quelqu’un qui vient prier ici régulièrement me dis-je.

Juste à cet instant arrive monsieur U. Il a toujours un beau sourire d’enfant. On se connait bien.

Il explique qu’il vient prier ici chaque matin.

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Monsieur U explique qu’avec l’argent collecté dans le tronc, une somme importante, il a fait tout refaire par un charpentier de la ville voisine. C’est de la très belle ouvrage.

Chevilles. Poutres en cryptomère. Colonnes en cyprès. On regarde chaque détail de la construction et c’est super chouette me dis-je que monsieur U ait pris la peine et la responsabilité d’organiser tous ces travaux.

L’idée me vient, à écrire ces lignes, que je ferais bien de glisser un petit billet dans le tronc du sanctuaire, puisque j’ai l’honneur de pouvoir découper cette gigantesque branche, pour Calcifer notre poêle à bois.

 

Un petit tour

Nous sommes allés faire un petit tour, une trentaine de kilomètres à l’est. Dans la région de Nakaharima. Kanzakigun, Kamikawa, Asagoshi. Toujours la campagne; des paysages qui se ressemblent. Beaucoup de verdure partout, les montagnes et les petites routes.

Et des découvertes.
Une boulangerie artisanale installée dans une ancienne maison. On peut s’y arrêter et prendre un café ou un thé. En discutant, on apprend que l’artisan boulanger a retapé lui même la maison centenaire. Il a construit un four à pain dans l’ancienne cuisine. Cuisson au bois. Caractéristique; le nom de la boulangerie écrit en caractères géants sur le toit de la maison.
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Dans un village environnant, de vieilles roues à aube qui permettent d’alimenter en eau les rizières.
La roue entrainée par le cours d’eau remonte l’eau chargée dans des petits godets sur un mètre  puis la verse dans la rizière. Système ingénieux et économique.
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Un peu plus loin vers le nord nous visitons une ville qui valut sa prosperité à l’exploitation d’une mine d’argent. Au 19e siècle des ingénieurs français y ont officié et introduit les dernières techniques de l’époque. La mine a fermé il y a 30 40 ans. Les mineurs dit-on étaient très bien payés. On nous dit aussi … que les mineurs ne faisaient pas de vieux os, beaucoup s’éteignaient, malades, dès la trentaine, dit-on.
Des prisonniers de guerre anglais y ont été employés. Des soldats de la Royal Air Force dont le navire a été coulé par un sous marin de la marine impériale au large de Singapour en 1942. Travaux forcés. On imagine les conditions très difficiles. (article)
Tout celà est à peine murmuré par un guide que nous rencontrons. La compagnie minière, Mitsubishi, est depuis partie creuser ailleurs.
Les anciens logements des employés de la mine ont été restaurés et on peut les visiter. Beau travail. La baignoire de l’époque. Jolie collection d’objets quotidiens de la période showa. Très bien fait.
On apprend que le grand acteur Shimura Takashi, qui a joué dans de nombreux films de Kurosawa,Vivre et Les Sept Samourais pour ne citer qu’eux est né là, dans ce logement de la mine. http://fr.wikipedia.org/wiki/Takashi_Shimura
On continue et prenons une petite route qui serpente dans la montagnes et nous rapproche de la maison.
Nous découvrons une autre mine; désaffectée. Au pied de la mine l’ancien gymnase de l’école, fermée, tient encore debout.
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L’endroit est désert. On se demande ce qu’en disent la montagne et les animaux qui l’habitent. Justement, la montagne dit-on, est tombée malade suite aux rejets de l’exploitation minière souterraine, et à un moment tous les arbres qui la recouvraient sont morts.
Un peu plus bas après le gymnase désaffecté il y a un joli pont; un superbe arbre ginkgo au pied duquel somnolent des jizos.
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Et partout les beaux paysages. Les paysans ont déjà planté les plants de riz dans les rizières. La nature n’est pas rancunière.
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La fin de la route

Le chemin qui traverse le hameau avant de partir en vrilles vers les tréfonds de la montagne amène; entre deux ponts, à un groupement de tombes batties à flanc de montagne. Il y a un monument, indéchiffrable, pour ceux qui se sont fait tuer à la guerre.

Il y a aussi 6 jizos.

Jizo: http://fr.wikipedia.org/wiki/Ksitigarbha

Wikipédia me met face à face à mon ignorance, et explique que les jizos ne sont pas six par hasard:

Roku Jizō[modifier]

Roku Jizō signifie 6 Jizo. Une représentation très répandue au Japon, en particulier à l’entrée des cimetières, est constituée de 6 statues de Jizo, une pour chacun des 6 mondes Loka. À noter que le baton de Jizo porte généralement 6 anneaux, dont la symbolique est la même :

  • Le Jizo qui visite l’enfer tient un bâton surmonté d’un crâne ou d’une tête humaine,
  • le Jizo qui visite le royaume des esprits affamés (en) porte un bol de mendiant pour nourrir les affamés,
  • le Jizo dans le monde des animaux tient une bannière
  • le Jizo du royaume des asuras porte la triple joyau (cintamani)
  • le Jizo du royaume humain porte un chapelet (Mâlâ)
  • et le Jizo du royaume céleste des deva tient un disque solaire et un vajra.

A mon prochain passage, je serai beaucoup plus attentif, et nous essaierons d’identifier chacun des six.