Tagué: la chasse au japon
Opération civet de chevreuil
Le mois dernier nous sommes allés visiter le bout de la vallée avec un jeune couple d’amis qui cherchent une maison.
Le hameau au fond de la vallée, plus de la moitié des maisons y sont abandonnées. Vingt personnes à peine y vivent encore.
C’est un bel endroit, entièrement couronné de montagnes. En fait c’est un coin magnifique.
Pour la visite nous sommes allés voir le chef du hameau; et avons fait les présentations. Puis nous sommes allés voir une maison genre Totoro, une très belle maison, une ancienne ferme, en assez bon état et tout le confort d’il y a un siècle à peine. A louer, pour une somme modique.
Bon finalement le jeune couple d’amis ça les a pas emballés mais c’est bien d’avoir quand même essayé me dis je.
A la fin de la visite le chef du hameau clopin clopant nous conduit à un petit hangar où trois frigos regorgent de viande de chevreuil.
Il prend les chevreuils dans des pièges, de grandes cages métalliques.
Une fois zigouillés, avec une lance, et tant qu’à faire il faut viser dans le cœur, pour bien les saigner, il les amène dans le hangar où il fait les découpes. En témoigne le sol écarlate. Et les crochets qui pendent du plafond. J’aurais dû prendre une photo. Deep Japan ou Deep France, c’est pareil ! Beaucoup de fondamentaux sont communs.
Il nous donne un énorme morceau de viande. 4 kilos.
Je l’ai mis à décongeler dimanche. Hier matin j’ai découpé le beau morceau. Toucher cette viande, cette viande vraie, réelle, pas comme celles prédécoupées et sous cellophane des super marchés ** était très agréable. On sentait encore la force et la puissance de l’animal.
Je vais faire un civet. Je vais laisser encore mariner un peu. J’irai en apporter un morceau au chef du hameau. En espérant ne pas me planter !
**A ce sujet regardez le film le gendarme à New York avec De Funès. Où ils se moquent des Américains avec leurs beef steaks sous cellophane.
Passer à l’orange et accidents de chasse
Cette année j’ai arrêté de porter des treillis militaires pour les travaux du jardin et dans la montagne.
Changement radical de style: Je suis passé à l’orange, et porte désormais des salopettes de cette couleur.
Le but, c’est de repérer facilement les sangsues et éviter que, indétectables sur les motifs de camouflage, elles arrivent à se promener dans mon slip !
Question treillis militaire nous aimions bien les camouflages à base de points Flecktarn de la Bundeswehr (allemagne fédérale), avec ce motif qui évoque les forêts de la lointaine Europe. Et aussi la variante désert qui convient très bien à la chaleur de l’été Japonais … mais bon …. par contre essayez de repérer une sangsue se promènant la-dessus …. C’est purement impossible.
Le pratique l’emporte sur l’esthétique.
Un autre soucis c’était d’éviter des accidents lorsque je travaille dans la montagne en période de chasse. Un mouvement, et hop on pourrait être pris pour du gibier et se prendre des plombs. J’avais donc posé la question à un bucheron qui travaille dans la région. Je lui avais demande s’il recommandait d’éviter de porter des camouflages militaires et s’il valait mieux opter pour des couleurs très voyantes. Sa réponse avait plus fait que m’étonner.
Le raisonnement du bucheron: ‘en fait la plupart des chasseurs sont des gens agés. Ils ont une mauvaise vue. Ils tirent plutôt a l’oreille, dans la direction des bruits que ferait un animal dans la montagne. Plutôt qu’un pantalon orange, mieux vaut emporter avec soi une radio, et mettre la musique à fond. C’est le meilleur moyen pour éviter les accidents de chasse (et aussi éviter les ours).’
Etonnant non ?
Le royaume des chats et autres divagations
En continuant plus au fond de la vallée où nous vivons, il y a les ruines d’un ancien élevage de poulets. Un belle horreur de ferraille et de plastique; qu’il faudrait bulldozer, mais l’argent et le cœur manquent aux anciens propriétaires pour cela.
C’est aussi ici que l’esprit commence à divaguer et à perdre pied.
L’homme a quitté les lieux. A partir de cet endroit, la route devient un chemin forestier. Plus loin il y a un temple abandonné et une maison tombée en ruines. Le temple a brulé il y a plusieurs années. Court-circuit électrique. Le moine est parti.
Dans cette zone s’opère la lente transition entre le monde de la forêt et celui des hommes. L’homme est parti mais a marqué l’endroit, avec tous les détritus qu’il a laissés. Ces détritus sont la pour longtemps.
Comme les mines antipersonnel que laissent les guerres. La forêt tente de reprendre ce qui lui a appartenu. La forêt a tout son temps.
Des colonies de chats ont envahi l’endroit. Ils sont un peu sauvages. Ils ont pris possession des lieux. Pour l’instant. Les ruines sont devenues le royaume des chats.
Au delà de ce poste frontière, c’est le monde de la montagne et des animaux sauvages. Chevreuils, sangliers et on peut imaginer les singes et les ours qu’on ne voit jamais. Les chats assurent la transition. Vérifient les papiers des voyageurs …
J’aperçois le camion d’un villageois, arrêté près de l’ancien élevage de poulets. C’est un habitué. Il vient voir les chats tous les jours. L’homme est très discret et ne veut pas que je le photographie. Les chats eux sont moins timides.
Ils sont bien mignons les chats.
On peut continuer sur le chemin, vers le temple abandonné.
Les chats observent le promeneur s’enfoncer dans la forêt.
Celui là file dare dare vers l’ancien temple, parti dans un incendie, comme pour prévenir les dieux, ou les animaux. Ou alors les animaux sont les nouveaux dieux. Et vice versa.
Voila la maison abandonnée, où vivait le responsable du temple. Les chats montent la garde.
Ah; le camion aperçu tout a l’heure vient. Pour une caresse du conducteur, un petit chat se hisse sur la roue avant.
Postscriptum et dur retour à la réalité.
Lors de la saison de la chasse, me raconte une voisine, les chasseurs se précipitent en camions sur les chemins et écrasent sans honte tous les chatons qui s’y trouvent; ‘on s’en fout, il y a trop de chats‘ disent ils.
A croire que la c….. des chasseurs est universelle.
Les chasseurs
Les chasseurs sont tous vêtus de costumes oranges. Ils sont discrets et silencieux. Leur visages sont fatigués. La lumière, à l’intérieur, est éteinte. Ils trainent la dépouille du chevreuil jusqu’au bord d’une rivière. Ils ne chassent plus pour le plaisir, mais pour l’argent. Voila pourquoi.
Les chasseurs vont retirer deux incisives du chevreuil avec une pince et une hachette et vont le prendre en photo. Ca leur permettra de toucher une prime de la préfecture. 6500 yens (50 Euros ou $65US) par bête, pour plus de 21 bêtes abattues dans la saison. Car le chevreuil est considéré comme nuisible.
Puis ils nous disent qu’on peut garder le chevreuil abattu si on veut et que sinon, ils iront le balourder au fond de la montagne. Visiblement ils en mangent tous les jours et n’ont pas besoin de s’encombrer.
L’homme et l’ours
Conversation
La Chasse.
Ici aussi malheureusement les chasseurs sévissent et tirent des coups. Certains font mouche.
Ils utilisent le même argument que les chasseurs de France: « il y a trop de gibier. Les chevreuils pullulent. Ils causent trop de dégats »
Celà doit être une règle mondiale: un collègue américain parti tirer le loup et l’ours en Alaska il y a six mois dépliait la même logique. « il y a trop de loups, il y a trop d’ours. »
Les Chinois lorsqu’ils auront fini de dominer le monde diront-ils un jour « il y a trop de blancs » ? Et lorsque les martiens envahirront la terre, diront-ils « il y a trop d’hommes » ?
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