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La conférence ….

La conférence s’est bien passée ! Devant donc quinze anciennes élèves de l’université de Nara.

Je dis que ça s’est bien passé car seulement une personne s’est endormie… le reste répondait bien aux plaisanteries, et il y a avait une bonne dynamique.

J’y ai pris vraiment plaisir, mais c’est normal, quand on la chance de parler de son histoire et de se savoir écouté.

Et en plus huit personnes ont acheté ma bande dessinée « retour sur terre » … Super cool !!

Préparer cette présentation c’était un peu résumer ma vie et essayer d’en extraire un sens et des choses qui pourraient intéresser des personnes de 70 ans …(qui ont donc plus de XP points que moi)

Voici quelques slides du power point.

La maison, en Charente Maritime, où mon père est né.

Dans un petit village de 300 âmes … Oh ces belles maisons charentaises qui évoquent un climat doux et clément … et les belles façades .. et ces murs de pierres d’un mètre d’épaisseur!

Un souvenir d’enfance c’est quand nous « re descendions » dans les Charentes, de Paris pour aller aider mon grand oncle aux travaux des vendanges… Je n’ai plus de photos de tout cela mais les outils, les barriques, on trouve les mêmes photos sur le net et même mon arrière grand père Gaston dont je n’ai pas de photo, la photo du vieil homme lui ressemble tant … même casquette … le même genre de chemise à carreaux … mon Gaston ne portait pas de bretelles par contre … mais lui aussi faisait godaille… et pour le dessert il versait du vin dans son verre et y trempait des biscuits brossard … je crois que ça s’appelait les boudoirs … ces biscuits

Ah oui mon arrière grand père Gaston ne portait pas la moustache … mais mises à part la moustache et les bretelles donc, la photo décrit le même personnage … la même génération d’hommes qui ont travaillé long et dur, et sont passés à travers les mailles des filets de 14 18 … des générations décimées. Gaston était bon en calcul et allait devenir charpentier … pendant la guerre il était artilleur … il y avait une photo, avec son équipe …

Voila je raconte ça aux vielles dames honorables, qui jadis ont étudié à l’université de Nara…

Après je continue sur la famille de ma mère, oléronaise … Oléron et tout ce que l’océan y offre … quelle belle région, encore !!

J’y fais la liste de toutes le choses que faisait mon grand père la chasse, la pèche, l’élevage de pigeons; poules, lapins, moutons; les abeilles aussi et tous les légumes … C’était une vraie industrie … Au fond c’était un paysan mon grand père …. il adorait ce genre de trucs … dommage qu’il n’aie pas fait son vin d’ailleurs …

Un peu plus tard je décris notre vie à Tokyo, et je mélange photos et extraits de ma Bande Dessinée

A Tokyo nous étions dans une belle cage dorée … nous étions heureux avec mon épouse et notre fils mais le manque d’espace à Tokyo, cette ville qui n’en finit pas, fait penser tout de même aux cages de lapins de mon grand père … attention à la myxomatose les amis !!

A partir de la dans la présentation je décris comment nous nous sommes installés au village, petit village au nord de Himeji et les slides s’appuient beaucoup sur la bande dessinée …

Une des conclusions c’est que la vie à la campagne au Japon et la vie à la campagne en France se ressemblent énormément, les climats et la végétation étant en effet assez proches…

Une grosse différence quand même c’est le cochon … Je leur raconte alors qu’enfant j’avais assisté à une pelère dans un village des pyrénées où nous avions de la famille …. le village tuait le cochon … quel spectacle ce fut … quand les gens sont ensemble, se retrouvent, travaillent .. que ce soit pour le cochon, ou pour récolter le thé …

Mais encore ici il y a des similitudes avec notre village au Japon. Lors de la pelère les hommes se sont regroupés pour attraper le cochon, et lui rendre gorge. Ensuite ils font le gros travail de le laver, et le dépecer … mais une fois le travail des hommes finis ils commencent à ouvrir les bouteilles de pinard, pendant que dans les cuisines les femmes se tapent tout le boulot interminable pour faire les saucisses et les boudins.

Magnifique!

Ici au village c’est un peu pareil lorsque nous faisons le nettoyage annuel de la rivière … les hommes descendent dans la rivière et « font le boulot des hommes » assez rapidement et pendant ce temps la les femmes sont en cuisine et préparent des onigiris, des tsukémonos, du thé … cette répartition des tâches et distribution des rôles entre hommes et femmes … pareil … et logique si je pense par exemple au maniement des tronçonneuses et le hisser des troncs hors de l’eau; pour nettoyer la rivière… Dans les deux cas quand même les femmes se tapent plus de boulot c’est certain !

Ci-dessous la dernière slide de la présentation ..

ou en effet j’arrive à la conclusion que en venant nous installer ici à la campagne j’ai fait comme une immense boucle; ayant quitté la France, m’étant installé au Japon, avec femme enfant et chats … pour plus modestement refaire les gestes de mon grand père et de mon oncle. D’où le titre de la BD « retour sur terre »

Ce Retour Sur Terre, ce retour à la campagne c’est aussi une grande boucle qui se fait à travers trois générations. Mon grand père, mon grand oncle qui vivaient presque en autarcie avec toutes leurs productions, mes parents qui ont embrassé la modernité et sont partis vivre sur Paris, avec toutes les opportunités professionnelles que la ville pouvait offrir et puis moi qui, aidé par internet, travaille dans une grande boite US et y poursuit les opportunités professionnelles similaires, mais ce depuis la campagne où j’essaie de réapprendre les choses de la campagne; et essaie de produire moi même, le plus possible.

La boucle est bouclée …

Ces journées d’été

Il fait très chaud. On parle de canicule pour la région du Kansai. Il faisait trente sept degrés aujourd’hui.

Voici une liste des événements de ces derniers jours…

 

  • Notre fils a encore trouvé un petit chaton sur le bord de la route; sur son chemin d’école. Très affaibli, il ne devait avoir que quelques jours. Nous l’avons recueilli et depuis il a repris des forces.

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Depuis il a commencé à s’habituer à la maison. Il explore. oh génial un paquet de chips … Au fond du caniveau où notre fils l’a trouvé, il n’aurait sans doute pas survécu la chaleur.

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Nos chats Scotch et Minou depuis hésitent à entrer dans la maison… l’odeur de ce petit intrus est une violation inacceptable du territoire … Mais d’ici quelques jours tout le monde devrait s’habituer je pense … La vie est faite de compromis.

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  • Suite aux très fortes pluies d’il y a dix jours, un petit canal attenant à la rivière qui longe notre maison et traverse le hameau a été bouché par du sable et des pierres. (ces canaux servent à l’irrigation des rizières, en aval). Avec les typhons il y aura d’autres pluies très fortes et il est crucial de laisser la rivière libérée de tout obstacle.

Avec ma petite pelle j’entreprends de dégager tout cela.

Avec la chaleur et le soleil qui tappent je m’y prends à plusieurs reprises, sans forcer, avec moultes pauses.

Toujours agréable de travailler dans la rivière, on redevient enfant …

 

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A chaque pause je m’allonge sur un banc à l’ombre du hanaré dans le jardin. J’observe longuement les nuages merveilleux. J’ai le droit; hein, il fait si chaud .. Voici des moments   bien précieux.

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  • Les dernières pluies ont aussi descendu de belles pierres. Il y en a une dont la forme plate et allongée est intéressante. Elle doit faire 80 ou 100 kg, no idea, je la déplace dans la rivière sur trente mètres pour ensuite la hisser le long d’un petit passage qui arrive sur la route.

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Pour cette opération titanesque j’ai préparé un petit chariot, fixant des roulettes sur une ancienne palette … comme je n’avais pas de rondelles métalliques à disposition j’utilise des pièces de cinq yens (elles sont perforées en leur milieu)… très pratique ! Voilà … chaque pays devrait avoir des pièces perforées … de préférence, celles de petite valeur. En plus cela ferait d’énormes économies de métal …

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Cette belle pierre arrivée à destination facilitera l’accès au hanaré côté rivière. Nous y avons mis un banc mais il est assez haut… (sur la photo, sur le banc, un oreiller en céramique, idéal pour la sieste).

Passque quand il fait chaud comme ça il faut se la couler douce, suivre le rythme, se calmer, faire la sieste … et là encore les chats nous montrent l’exemple à suivre.

  • Ici Minou qui sait tirer de l’ombre d’une table quelques moments de répit.

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  • Dans le jardin on installe une cuisine d’été improvisée. Préparation d’une ratatouille.

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  • Le matin on va donner un coup de main aux habitants du hameau au fond de la vallée pour préparer une fête de nuit aux flambeaux, ou fête du feu.

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Les montagnes qui entourent précieusement ce petit hameau comme un joyau sont superbes. J’aime beaucoup ces travaux avec les autres habitants; toujours l’occasion de passer un bon moment et d’apprendre de nombreuses choses et de mieux faire connaissance.

A monsieur O je lui fais la remarque que, Denis, lecteur du blog saigne ses chevreuils la tête en haut. Un autre villageois confirme connaitre quelqu’un qui les saigne; comme Denis, la tête en haut. Monsieur O philosophe écoute avec respect mais conclut la discussion avec moi je le fais la tête en bas !

Monsieur K est une connaissance plus récente, lui aussi est un chasseur et un personnage tout en couleur. Fin cuisinier il nous a fait goûter à ses préparations de chevreuil, tout en finesse. Il me dit Tu aimes la tortue ? TURTLE !!!

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Fait toujours aussi chaud mais on aimerait bien construire une petite cabane tout en haut d’une montagne.

Travaux collectifs: le nettoyage de la rivière

Une fois l’an, un dimanche après midi en décembre, tous les habitants du village se regroupent pour le nettoyage de la rivière. (voir aussi l’article écrit en 2012 sur le même sujet !)

Ici dans cette région du Japon les précipitations peuvent être soudaines et très importantes. Il y a aussi les typhons. Il est crucial que la rivière soit propre et qu’aucun obstacle ne vienne à freiner son débit. Sinon, il pourrait y avoir des désastres, comme  des débordements, des inondations avec des maisons emportées par les flots déchainés ou encore l’effondrement de berges ou de ponts.

Le nettoyage de la rivière, c’est un événement important. Ca n’est pas unique; au Japon c’est très répandu je crois. Qu’en est-il dans les campagnes de France et d’ailleurs ?

En tout cas on peut apprécier de voir la petite communauté prendre le sort de sa rivière en main et unir ainsi ses forces cet après midi d’hiver, sans utiliser les resources ou les services de la municipalité, de la région ou de l’état. On n’est jamais mieux servi que par soi-même.

Tous les hommes se regroupent. On est en habits de travail. Tout le monde porte à sa ceinture une serpe kama 鎌, ou bien une hachette nata 鉈, ou encore une scie noko 鋸.

Le chef du village aura décidé des petits groupes qui vont se répartir le travail à différents endroits le long de la rivière. Puis on va couper les bambous ou encore retirer les poubelles ou les branches de bois mort qui encombrent le lit de la rivière. Tout le monde est très bien organisé. Il y a ceux qui descendent dans la rivière pour couper et tronçonner, il y a ceux armés de leur petits camions keitora dans lesquels ils vont charger toutes les coupes pour les emmener ailleurs, là où on ira faire le tondo plus tard en janvier.

Cette année notre équipe était chargée de couper et débiter un vieux marronnier dont le tronc courbe venait freiner le débit de la rivière pendant les grandes pluies. Je suis triste de voir couper ce bel arbre. Je voulais nettoyer la rivière, pas vraiment voir couper d’arbres. Mais bon, cet arbre, un typhon aurait pu l’arracher, et il aurait pu alors se ficher sous un pont et qui sait alors si le pont aurait pu résister à la puissance décuplée de l’eau. Le malheureux marronnier, finira d’ailleurs dans notre tas de bois pour être jeté dans le ventre de calcifer.

Après deux bonnes heures de travail on se retrouve tous au foyer du village, les hommes s’asseyent d’un côté et les femmes de l’autre. La bière, le saké, le shochu. Des bouts de cochon, une soupe, une salade de pattes mmm quel régal. Les gens sont de bonne humeur. C’est une petite fête.

Quel bon moment en bonne société!

kawa souji 1

kawa souji 3 kawa souji 2

 

Le nettoyage de la rivière

Aujourd’hui dimanche, de 13:30 à 15:30 avait lieu le nettoyage de la rivière.

Tous les habitants du hameau se sont regroupés.
C’est très organisé, comme lors du mochitsuki.
Les femmes sont divisées en deux groupes. Un se charge de ramasser les éventuels détritus sur les berges de la rivière. Le deuxième groupe est aux fourneaux et prépare les réjouissances qui suivront. Les rares enfants sont avec les femmes.
Les hommes eux sont ensemble. Tout le monde a des bottes, des vêtements de travail, et est armé de faux; de haches recourbées et de scies courtes. Certains amènent leurs keitracks.
On monte à l’arrière des keitracks, pour se rendre en aval. C’est chouette de monter à l’arrière du keitrack. Ca fonce sur 500 mètres avec le vent qui souffle dans les oreilles.
Trois groupes se forment et se dispatchent à plusieurs endroits le long de la rivière. On ne nettoie pas les mêmes chaque année.
Puis tout le monde descend.
L’ambiance est bien macho. Il y a quelques jeunes, mais la plupart ont plus de 60 ans, il y a quelques hommes qui ont plus de quatre vingts ans.
Certains descendent et vont travailler les berges immédiates de la rivière, les pieds dans l’eau. D’autres et parmi eux les plus agés restent sur la route, ils s’occuperont de charger dans les keitracks  ce que ceux d’en bas auront coupé et rassemblé.
Tout le monde s’affaire. Certains transpirent malgré l’hiver. On scie des arbres morts qui obstruent la rivière. On ramasse les canettes de café qui la polluent. On coupe les herbes, les bambous mélangés comme des mikados, on ramasse du bois mort bloqué entre des pierres.
Les pluies dans le pays sont brusques et violentes. Il faut que la rivière soit bien dégagée afin de bien dégorger les montagnes et les forêts; sous peine d’avoir des inondations. Il y a déjà assez de catastrophes naturelles comme ça.
Mes bottes sont trop courtes. Elles prennent l’eau. Les pierre arrondies qui forment le lit de la rivière sont glissantes, il faut faire attention; surtout qu’on portes de outils tranchants et très dangereux. Je glisse une fois pour tomber le cul dans l’eau. Heureusement je tiens ma serpe fermement et ne m’ampute pas. J’ai encore besoin de mes dix doigts.
Les deux heures de travail sont intenses. Les gens sont sérieux et travaillent sans rigoler beaucoup. Il s’agit d’être efficace.
Une fois le nettoyage fini on se retrouve. Certains s’assoient. C’est le moment d’allumer une cigarette et de discuter.
Les keitracks reviennent. Ils viennent charger le bois et les herbes coupées. On balaye la route pour n’y laisser aucune stigmate du nettoyage. Les petits camions partent tout déverser dans un petit parc au nord du hameau. C’est là que l’on fera le tondo; à la mi janvier.
Le tondo; mais je le verrai de mes yeux dans un mois, c’est un grand bucher que l’on organise. On célèbre l’année nouvelle. Ceux qui se baignent des fumées du tondo sont bons pour l’année: ils ne tomberont pas malades, et tout ira bien pour eux.
Le travail est terminé. Il faut marquer le coup. Tout le monde converge vers le foyer communautaire. On retrouve le groupe des femmes et des enfants. Ils ont trouvé quelques canettes et des sac plastiques, mais en petites quantités.
Le foyer communautaire est prêt. Le premier groupe de femmes y a oeuvré. Les tables sont mises. Il y a des jus de fruits; de la bière et du saké chaud à profusion. C’est génial. Les tables ont du jambon, et de l’oden chauffe dans des chaudrons. Chacun prend une place. On passe un bon moment, au chaud. Il doit y avoir 80 pour cents du village réuni. Pas beaucoup d’occasions comme ça dans l’année.
On fait connaissance. Oui, on passe un bon moment; pour clore une bien belle journée.