Tagué: transfert d’énergie
C’est mieux
Avec un peu plus d’application, on obtient un meilleur résultat.
Cette fois ci je prends plus de temps et évite de trop écarter le bois. C’est bien mieux.
Voici les planches obtenues avec les deux demi troncs.
Transformer la matière
Oui, ici à la campagne au Japon, nous sommes un peu loin du monde, presque loin de tout. Nous produisons nos propres distractions. Grâce à l’absence d’interférences nous pouvons rester concentrés sur nos projets et creuser nos petits sillons.
Une des choses passionnantes avec le bois c’est comment on peut le transformer. Tant que l’on reste dans le sens de la fibre… le bois se laisse transformer à l’image de nos idées.
J’ai commencé à scier dans la longueur le premier demi tronc d’arbre descendu de la montagne.
J’aime bien ces projets longs qui s’étalent sur des mois. On avance pas à pas, mètre à mètre. On sait jamais quand on aura fini…
Les cinq planchettes obtenues serviront à construire la barrière …..
En fait le résultat n’est pas super top, il faut que je trouve une meilleure façon de faire … pour la prochaine fois …
Les outils tradis pour faire les mesures … la règle sashigané 差し金 le vieux sumitsubo et le sumisashi 墨差しen bambou
墨壺 すみつぼ sumitsubo pour tracer les lignes … (version moderne)
A la scie circulaire….
Finis à la scie tout court … ma scie circulaire étant trop petite …
Et voila. Faudra un petit coup de rabot. C’est pas vraiment top le résultat… Faut que je trouve un moyen à mieux faire …
Je suis quand même content .. C’est intéressant de voir comment on peut transformer la matière avec de simples outils …
Energie Solaire et bois de chauffe
La recherche d’opportunités pour trouver du bois de chauffe est constante. Car, en hiver, Calcifer notre poêle à bois a très faim.
Cette fois-ci c’était assez spécial: nous avons reçu l’appel d’une connaissance nous informant d’une gigantesque installation de panneaux photovoltaïques à 30 kilomètres du village.
Pour ce faire une entière foret a été rasée. Et il est possible d’y aller chercher du bois.C’est un gros chantier avec des pelleteuses et plusieurs dizaines de personnes. Les branches des arbres ont été broyées, et il reste les troncs d’arbres, coupés et rangés en tas réguliers.
L’installation photovoltaïque est impressionnante. La capacité prévue est de 2 Mégawatts. 2 Mégawatts … c’est vingt mille panneaux solaires …
Pour nous c’est une affaire en or, car il suffit de charger le camion et de prendre tout le bois possible.
Cela pose la question tout de même de l’énergie solaire déployée ainsi à échelle industrielle. L’énergie solaire c’est l’avenir absolument … mais raser des forêts pour poser des milliers de photovoltaïques ? On peut être dubitatif. Est-on condamné à toujours détruire la nature ? Encore la démesure, l’hubris ?
Voir le sol de la forêt, dénudé, écrasé et tassé par les engins est une vision attristante. La vie est partie et la terre meurt.
OK l’énergie solaire est nécessaire pour pouvoir se désengager du nucléaire et du pétrole, ces grands cancers qui dévorent l’avenir du monde; donc cette installation, c’est donc un moindre mal. Mais si quelqu’un venait à me demander mon avis je dirais que je préfère l’installation solaire modeste sur le toit de la maison autonome et pas raccordée au réseau … voila le rêve.
On note le développement exceptionnel du solaire au Japon grâce à une tarification avantageuse et garantie pour 10 ans …. les photovoltaiques poussent partout comme des champignons.
Mais bon pendant ce temps, on a chargé le camion de notre ami. Les essences sont de qualité. Beaucoup de chêne. Le bois coupé au mois de mai a séché pendant l’été. Reste à le couper, le fendre et à le ranger avec amour …. Y a du boulot !
Le cerisier éléphant
En explorant un chemin qui part dans la forêt je découvre une magnifique clairière, au bout de laquelle de vieilles tombes sommeillent. Ca n’est pas le cimetière principal du village. Il n’y a que quelques tombes.
C’est un lieu de paix. Le chant des oiseaux. Le calme humide de la forêt. On est totalement avec la nature. Les ancêtres qui reposent ici sont privilégiés. On les envierait presque.
Au pied des tombes s’étend dans un grand creux, une fosse: un ancien champ de théiers.
Là, un immense cerisier est effondré. Des ronces et la jungle un peu partout.
Plus tard je vais voir le chef du village. Et m’enquiers de cet arbre. Il est tombé, tout seul apparemment. Après vérifications je décide de récupérer le bois du cerisier dont Calcifer, notre poêle à bois, sera friand.
Voilà une entreprise un peu ardue pour mon niveau et mon expérience somme toute encore limités.
Il faut:
descendre dans la fosse,
dégager les criptomères effondrés et les ronces qui bloquent le passage,
atteindre le cerisier; tronçonner.
porter le bois jusqu’au chemin;
charger la brouette,
descendre la brouette sur cinquante mètres;
décharger tout;
et ensuite tout ranger dans le camion.
C’est beaucoup de travail, mais comme on voit à chaque nouveau projet, il suffit de chercher le meilleur angle d’attaque et d’y aller, tranquillement; et en faisant attention à ne pas se blesser. A partir de ce point là, il n’y a pas vraiment de risque. Il suffit d’y aller.
Le travail est intense et très agréable. Le cerisier est beaucoup plus grand que je ne l’avais imaginé. Et le bois, bien qu’un peu humide, est en excellent état.
A tronçonner cet arbre géant, j’observe et apprends sa structure. On peut imaginer comment il se dressait et emplissait la clairière de son énergie, avant qu’il ne tombe. Ses branches, énormes, font penser aux pattes d’un éléphant qui se serait échoué ici dans les bois. Je découpe les morceaux de bois avec respect et reconnaissance. A plusieurs reprises d’ailleurs je m’entends dire merci.
Je me dis que ce bois que je vais finir par brûler je le vole à la forêt car sans mon intervention il serait lentement retourné à la terre et aurait nourri des millions de petites bestioles et aurait embelli la forêt une nouvelle fois, de son énergie.
Il s’agit là d’un réel transfert d’énergie. L’énergie de l’arbre que le temps et les champignons et la terre auraient lentement absorbée; je la prends; la mets dans mon camion et Calcifer le poêle à bois nous la restituera sous forme de chaleur.
Les tronçons que je tronçonne. Je pense à ces images abominables des trafiquants d’ivoire (et le roi d’Espagne aussi) qui massacrent les pachydermes.
Pourquoi l’arbre, éléphant de la forêt, est-il tombé ? Suis-je dans le cimetière des éléphants ?
Là, deux des six jizos qui marquent l’entrée du cimetière. A leur pied, le cerisier éléphant.
C’était un cerisier géant.
que ma tronçonneuse démembre.
et que je charge dans la brouette bleue.
Le camion Keitora est plein, bien au delà de sa limite de 350kg.
Et on range le bois, sous un abri provisoire. Le temps d’agrandir l’abri bois …
La puissance de la nature
A chaque instant nous sommes rappelés à la puissance de la nature.
1) Des grenouilles; les moriaogaeru (Rhacophorus arboreus), sur la branche d’arbre située au dessus d’un étang, pondent leurs oeufs dans un nuage de mousse blanche. Les têtards; une fois le moment venu, tomberont dans l’eau de l’étang et y continueront leur développement.
2) Une guêpe a édifié un nid délicat sur le rayon d’une roue de notre bicyclette. Sept alvéoles de papier.
3) Des guêpes encore ont vu dans les détails de la cloche du temple du village l’opportunité de bâtir avec le moindre effort.
Vocabulaire
かえる 蛙 Grenouille
Calcifer – portrait
Calcifer, c’est notre poêle à bois. Il nous a bien aidé pour passer l’hiver au chaud. Il nous a aussi donné beaucoup de travail, pour aller trouver le bois dont il est si friand. On peut parler de transfert d’énergie. Ma sueur pour aller chercher le bois; le couper; le ranger etc … et le travail des forêts et du soleil et de la pluie pour faire pousser les arbres … tout celà pour que nous n’ayons pas froid.
Aujourd’hui en ce début mai il fait frais; et nous réveillons Calcifer et lui offrons quelques bûches.
Sacré Calcifer ! Il fallait bien que je le dessine et que j’en fasse le portrait; pour vous le présenter.
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